L’histoire de l’évolution des exigences en matière de mains courantes dans le Code national du bâtiment (CNB) illustre bien la complexité des ajustements progressifs nécessaires pour répondre aux besoins en sécurité et en accessibilité. Depuis ses premières versions, le CNB a mis l’accent sur la sécurité dans les escaliers, les rampes et les issues, en définissant des règles strictes concernant la conception et l’emplacement des mains courantes. Cependant, les parties 3 et 9 du CNB, qui concernent pour l’un les grands bâtiments pouvant avoir une plus grande charge d’occupants du public et pour l’autre les petits bâtiments ayant une charge d’occupants limitée, ont évolué à des rythmes différents.

Saviez-vous que la langue (pensez au choix de vocabulaire, la syntaxe des phrases, etc.) a parfois joué un rôle clé dans les nouvelles formulations des exigences à travers le temps? Il ne faut pas oublier que, depuis 1941, le CNB est d’abord rédigé en anglais et ensuite traduit en français. Ainsi, depuis le 25 mai 1984, où la réglementation québécoise a commencé à utiliser les documents des publications du Conseil national de recherches du Canada (CNRC), la compréhension de ces exigences pouvait être différente selon la personne qui les lisait, bien que l’intention des exigences était similaire à celles des règlements précédents québécois. Ceci est périlleux dans un contexte juridique. Ainsi, comme une erreur 404 dans une page d’un site Web, lorsque le texte est problématique, il faut agir pour faire corriger le tout.

Comme les modifications à la réglementation découlent des commentaires transmis au nouveau comité canadien de l’harmonisation des codes de construction (CCHCC) par les utilisateurs, si vous ne prenez pas la peine de transmettre des demandes de modifications aux codes, parfois des exigences ne sont pas touchées pendant plusieurs cycles de rédaction du CNB et il peut y avoir des différences qui ne sont pas nécessaires entre la partie 3 et la partie 9 et parfois, au contraire, des informations contradictoires qui nuisent à la compréhension des exigences des solutions acceptables.

Dans le présent article, nous allons regarder deux situations démontrant l’évolution des exigences, soit les mains courantes intermédiaires et l’empiétement des mains courantes dans les largeurs des issues. Vous allez donc peut-être réaliser, selon l’année lors de laquelle vous avez suivi votre premier cours sur le CNB, et surtout si vous n’avez pas pris des formations sur les changements à travers le temps, que vous avez peut-être un geste automatique de conception qui ne reflète pas les exigences en vigueur actuellement.

La reconnaissance des mains courantes intermédiaires

L’une des premières grandes distinctions que nous souhaitons vous présenter dans cet article est l’évolution du CNB concernant les mains courantes et la reconnaissance de la nécessité de mains courantes intermédiaires pour les larges escaliers.

Les exigences de Conformité aux normes applicables en fonction de l’année de construction du Code de sécurité visant les bâtiments existants, pour les bâtiments construits avant le 1er décembre 1976, étaient :

Les escaliers et les rampes doivent avoir 2 mains courantes s’ils ont plus de 1 100 mm de largeur [alinéa 21. 1.e) du R.R.Q., 1981, chapitre S-3, r. 4)].

À cette époque, il n’y avait aucun énoncé ou exigence concernant les mains courantes intermédiaires dans les larges escaliers.

Dès la parution du Code du bâtiment du Québec, qui est entré en vigueur le 1er décembre 1976, la réglementation exigeait, pour les nouveaux bâtiments et les transformations, que :

Lorsque la largeur prescrite pour une rampe ou un escalier dépasse 88 pouces (2 235 mm), on doit prévoir une ou plusieurs mains courantes intermédiaires et continues entre les paliers. Leur nombre et leur position doivent être tels qu’il n’y ait pas plus de 66 pouces (1 675 mm) entre elles. [3.4.8.5. 2) du Code du bâtiment du Québec].

Néanmoins, dans la partie 9, selon la largeur des escaliers, celle-ci était l’exigence :

Il doit y avoir une main courante sur au moins un côté d’un escalier de 44 pouces (1 120 mm) ou moins de largeur, et sur 2 côtés d’un escalier ayant plus de 44 pouces (1 120 mm) de largeur. [9.6.7. 4) du Code du bâtiment du Québec].

Il n’y avait donc rien concernant les mains courantes intermédiaires : la préoccupation était pour les bâtiments qui contenaient une population importante.

Pendant 30 ans, du CNB 1980 mod. Qc jusqu’au CNB 2010 mod. Qc, il y avait cette exigence dans la partie 3 :

Si la largeur exigée pour une rampe ou une volée d’escalier est supérieure à 2 200 mm, il faut prévoir une ou plusieurs mains courantes intermédiaires ininterrompues d’un palier à l’autre sans que l’intervalle entre deux mains courantes ne dépasse 1 650 mm.[1]

If the required width of a ramp or flight of stairs is more than 2,200 mm, one or more intermediate handrails continuous between landings shall be provided, and located so that there will be not more than 1,650 mm between handrails.

Pour le besoin de mes explications, je vais donc présenter le texte en français, soit la version que j’ai apprise dans ma pratique au Québec, et la version originale anglophone que j’ai recherchée dans les Archives des publications du CNRC :est-ce qu’à travers le temps, la formulation a été identique et comprise de la même manière? La partie 3, axée sur les grands bâtiments, a donc intégré plus tôt cette exigence que la partie 9, en raison des risques liés aux zones de haute fréquentation. Ces mains courantes intermédiaires permettent de diviser les escaliers en zones étroites, offrant un appui sécurisé aux utilisateurs lors d’urgences ou de mouvements brusques. La distance de 1 650 mm impliquait que la personne qui se trouvait exactement entre les deux mains courantes était à 825 mm de l’une des mains courantes. Toutefois, ces versions du CNB demandaient qu’uniquement les largeurs exigées soient prises en considération.

 

En revanche, pour les bâtiments régis par la partie 9, principalement résidentiels, l’intégration de telles exigences a pris plus de temps. En effet, les escaliers dans les maisons individuelles ou dans les petits bâtiments sont généralement plus étroits et moins fréquentés que ceux dans les grands bâtiments. Ce n’est qu’avec l’essor de l’habitat collectif que la nécessité de mains courantes intermédiaires dans ces structures est devenue plus évidente. Ainsi, ce n’est que dans le CNB 2010 mod. Qc que différentes modifications à l’article 9.8.7.1. concernant les mains courantes exigées introduit les exigences qui viseraient les mains courantes intermédiaires, sans utiliser à proprement dit ce terme.

Si un escalier ou une rampe doit avoir une largeur d’au moins 2 200 mm en raison du nombre de personnes, une main courante doit être installée de telle sorte qu’aucune position sur l’escalier ou la rampe ne soit à plus de 825 mm d’une main courante. [9.8.7.1. 2) du CNB 2010 mod. Qc]

Where a stair or a ramp is required to be at least 2,200 mm wide due to the occupant load, a handrail shall be installed such that no position on the stair or ramp is more than 825 mm from a handrail.

 

Donc, dans la partie 9, à partir du 13 juin 2015, soit la date d’entrée en vigueur du CNB 2010 mod. Qc, les mains courantes intermédiaires sont encadrées par le texte réglementaire provincial si le nombre de personnes nécessite une largeur d’au moins 2 200 mm..

En considérant un taux de 8 mm par personne, un escalier de 2 200 mm permet tout de même à 275 personnes d’évacuer le bâtiment. Ce serait un bâtiment de partie 9 très populeux! Y a-t-il eu un tel bâtiment construit au Québec? Il nous apparait que cette situation doit être très peu fréquente : imaginons un établissement commercial qui aurait une aire de bâtiment de 600 m2. Il devrait être totalement occupé par une aire de vente sans locaux de stockage pour pouvoir calculer une surface de 3,7 m2 par occupant, obtenant ainsi une population de 162 personnes sur une aire de plancher. Il faudrait donc que tous ces occupants soient présents dans le sous-sol et dans les trois (3) étages du bâtiment qui serait en aires communicantes et pour lequel l’option de conception des moyens d’évacuation serait de faire le cumul de la population. De plus, le bâtiment aurait été conçu avec uniquement deux (2) cages d’escalier pour obtenir une telle largeur! Si vous connaissez un exemple de ce cas très hypothétique, vous pouvez nous écrire pour nous le signaler!

On peut, toutefois, voir dans le libellé de cette exigence de la partie 9 que le CNB reconnait ici que les notions de l’anthropométrie impliquent qu’une personne qui circule sur les marches d’un escalier nécessite une distance de 825 mm pour atteindre cette main courante. Donc, ici, bizarrement, bien que les bâtiments assujettis à la partie 9 ne contiennent pas autant de personnes que ceux assujettis à la partie 3, la partie 9 a devancé la partie 3 en explicitant cette exigence, alors que la partie 3 utilisait la distance entre les mains courantes.

À la suite d’une analyse des dossiers de chutes et des besoins des usagers, ainsi que de la révision des dimensions anthropométriques pour mieux répondre aux besoins des enfants et des personnes ayant des limitations de mobilité, les exigences des mains courantes intermédiaires ont été modifiées dans la partie 3 du CNB 2015 mod. Qc en réécrivant le début de l’article 3.4.6.5 afin de permettre de les atteindre de façon sécuritaire.

3.4.6.5. Mains courantes

1) Les escaliers de moins de 1 100 mm de largeur doivent être munis de 1 main courante.

2) Une main courante doit être installée de chaque côté :

a) d’escaliers d’au moins 1 100 mm de largeur;

b) de volées tournantes, peu importe la largeur; et

c) de rampes.

3) Outre les exigences du paragraphe 2), des mains courantes intermédiaires doivent être installées de manière :

a) qu’une main courante se trouve à au plus 750 mm de toutes les parties de la largeur d’issue exigée;

b) qu’au moins une partie de l’escalier ou de la rampe entre deux mains courantes ait la largeur minimale exigée pour les escaliers ou les rampes

(voir les paragraphes 3.4.3.2. 8) et 3.4.3.3. 4)); et

c) que toutes les autres parties de l’escalier ou de la rampe entre deux mains courantes aient une largeur libre d’au moins 510 mm.

4) Si un escalier ou une rampe est plus large que la largeur exigée pour l’issue, des mains courantes doivent être installées le long du parcours le plus direct (voir la note A-3.4.6.5. 4)).

3.4.6.5. Handrails

1) One handrail shall be provided on stairs that are less than 1,100 mm in width.

2) One handrail shall be provided on each side of

a) stairs that are 1,100 mm or more in width,

b) curved flights of any width, and

c) ramps.

3) In addition to Sentence (2), intermediate handrails shall be provided so that

a) a handrail is reachable within 750 mm of all portions of the required exit width,

b) at least one portion of the stair or ramp between two handrails is the minimum width required for stairways or ramps (see Sentences 3.4.3.2.(8) and 3.4.3.3.(4)), and

c) all other portions of the stair or ramp between two handrails have a clear width of 510 mm or more.

4) Where a stair or ramp is wider than its required exit width, handrails shall be

located along the most direct path of travel. (See Note A-3.4.6.5.(4).)

Cependant, nous constatons à la lecture de ces paragraphes de l’article 3.4.6.5. Mains courantes dans la partie 3 du CNB 2015 mod. Qc que la dimension d’accès de la main courante est maintenant plus petite que dans les versions précédentes du CNB, car il faut trouver une main courante à au plus 750 mm de toutes les parties de la largeur exigée des issues, au lieu de 825 mm. Ceci implique que deux mains courantes doivent être espacées d’au plus 1 500 mm plutôt que de 1 650 mm. Donc, comme cela s’applique aux parties de la largeur d’issue exigée de larges escaliers, il est possible d’éviter les mains courantes répétitives dans des conceptions comportant des escaliers architecturaux décoratifs qui servent parfois de gradins extérieurs puisqu’une telle largeur n’est pas requise. Il faut, tout de même, prendre en compte le parcours le plus direct et installer les mains courantes le long de ce parcours, comme l’indique le contenu de la note A-3.4.6.5. 4) :

Escalier plus large que ce qui est exigé. Le paragraphe 3.4.6.5. 4) a pour objet de mettre en place des mains courantes seulement pour la largeur exigée de l’issue, sans égard à la largeur réelle de l’escalier ou de la rampe. Les mains courantes requises sont installées le long du parcours naturel présumé vers et depuis le bâtiment. (A-3.4.6.5. 4) du CNB 2015 mod. Qc

Wider Stairs than Required. The intent of Sentence 3.4.6.5.(4) is that handrails be installed in relation to the required exit width only, regardless of the actual width of the stair and ramp. The required handrails are provided along the assumed natural path of travel to and from the building.

 

Cette fois, la partie 9 a fait une modification similaire, au même moment que la partie 3, mais qui comporte une grande différence, qui, nous espérons, n’aura pas d’effet particulier sur la conception des escaliers. …!

Sauf si un escalier ou une rampe ne dessert pas plus de deux logements, au moins une main courante doit être située à au plus 750 mm du parcours naturel sur l’escalier ou la rampe (voir la note A-9.8.7.1. 2)) [CNB 2015 mod. Qc]

Except where a stair or ramp serves not more than two dwelling units, at least one handrail shall be located not more than 750 mm from the natural path of travel on the stair or ramp. (See Note A-9.8.7.1.(2).)

 

On peut voir dans le texte de l’exigence que la présence de la main courante n’est plus liée à la population ou même à la largeur exigée. La présence de mains courantes est pensée en fonction du risque de chute. Il y a un allègement pour des escaliers ou une rampe qui ne desservent pas plus de deux logements, mais pour les autres escaliers, il faut analyser le parcours naturel sur l’escalier et s’assurer qu’au moins une main courante soit située à au plus 750 mm de ce parcours naturel.

La note A-9.8.7.1. 2), bien qu’elle ne soit présentée qu’à des fins explicatives et ne fasse pas partie des exigences, commente le fait que les escaliers peuvent être plus larges que la largeur exigée.

Escaliers plus larges que la largeur exigée. Le paragraphe 9.8.7.1. 2) vise à faire en sorte que les mains courantes soient installées uniquement par rapport à la largeur exigée des issues, peu importe la largeur réelle de l’escalier ou de la rampe. Les mains courantes exigées sont installées le long du présumé parcours naturel en provenance et à destination du bâtiment. [CNB 2015 mod. Qc]

Wider Stairs than Required. The intent of Sentence 9.8.7.1.(2) is that handrails be installed in relation to the required exit width only, regardless of the actual width of the stair and ramp. The required handrails are provided along the assumed natural path of travel to and from the building.

 

Le texte réglementaire de la solution acceptable du paragraphe 9.8.7.1. 2) n’en fait toutefois pas mention! Est-ce qu’il aurait été judicieux que le libellé de l’exigence de la partie 9 soit aussi explicite que celui de la partie 3, surtout considérant que la note dit exactement la même chose? On verra à travers la pratique les situations problématiques qui nécessiteraient de soumettre des demandes de changement au CCHCC dans le cas où des autorités compétentes un peu trop zélées considéreraient que la note réitère que les mains courantes sont installées pour la portion de la largeur exigée des issues.

Néanmoins, une mauvaise compréhension de la déambulation des occupants impliquerait parfois que les mains courantes requises ne soient pas présentes sur les dessins dans le parcours naturel et qu’il soit nécessaire de faire des modifications après la construction, car les traces dans la neige et l’usure des marches indiquent clairement que le parcours naturel des occupants du bâtiment n’est pas celui où sont situées les mains courantes. Si vous souhaitez aller plus loin concernant la déambulation des occupants, nous offrons une formation avancée sur Les risques de chutes et de glissades sur les aires de plancher, les escaliers et les rampes : comment les évaluer et les réduire?

Finalement, en ce qui concerne la présence des mains courantes intermédiaires, il n’y a pas de différence notable dans la qualité de l’écriture entre la version française et anglaise ou entre les formulations de la partie 3 et de la partie 9, contrairement à notre deuxième sujet : l’empiétement des mains courantes

Empiétement des mains courantes et largeur des issues

Un autre point de divergence entre les parties 3 et 9 que nous souhaitons explorer dans cet article est la méthode de calcul de l’empiétement des mains courantes sur la largeur des issues. Dans les grandes structures, il est crucial que les mains courantes n’entravent pas l’évacuation rapide. Ainsi, la partie 3 du CNB a mis en place une méthode de calcul pour éviter que l’empiétement ne réduise la largeur utile des issues. L’objectif est de garantir une évacuation fluide, même en présence de mains courantes. Dans la partie 3, l’exigence se trouve spécifiquement dans un article de la sous-section 3.4.3. portant sur la largeur et la hauteur des issues et non pas dans l’article visant spécifiquement les mains courantes. Alors que dans la partie 9, les exigences de l’empiétement sont traitées dans un article qui regroupe tous les paragraphes visant la conception et la construction des mains courantes.

Dans les petits bâtiments, la méthodologie de calcul de cet empiétement a évolué différemment, je dirais même bizarrement, considérant que les exigences des mains courantes intermédiaires ne sont apparues que dans le CNB 2010 mod. Qc. Il faut comprendre que, pour ce type de bâtiment, les besoins d’évacuation sont moindres et donc l’empiétement n’avait pas nécessairement les mêmes conséquences. Cependant, avec l’augmentation des normes d’accessibilité, des critères similaires ont été adoptés pour assurer la sécurité dans les bâtiments résidentiels.

Si nous revenons dans le temps, pour les bâtiments construits avant le 1er décembre 1976, dans le Règlement sur la sécurité dans les édifices publics, l’exigence était :

Aucune issue ne doit être diminuée dans la direction de son parcours, à l’exception entre autres d’une main courante qui ne doit pas faire saillie de plus de 90 mm sur les murs [14. b)ii) du R.R.Q., 1981, chapitre S-3, r. 4)].

Donc, ici, la présence de mains courantes intermédiaires n’était pas prise en compte, car on parlait spécifiquement de mains courantes murales. Dans Le Code du bâtiment du Québec, les paragraphes 3.4.3.4. 4) ou 9.6.7. 12) énonçaient des exigences sur la réduction de la largeur d’issue :

La saillie formée par une main courante ne doit pas réduire de plus 3 ½ pouces (89 mm) la largeur prescrite de l’issue.

Le libellé de la partie 9 était légèrement différent, mais l’intention était similaire : le libellé de l’exigence présumait que les mains courantes étaient murales avec l’utilisation du mot « saillie ». Alors que, dans les faits, les mains courantes pouvaient aussi être au sommet d’un garde-corps. À noter que dans le CNB 1977, qui n’a pas été en vigueur dans la réglementation provinciale au Québec, la section 9.8.7. qui visait les mains courantes indiquait :

Une main courante ou un limon ne doivent pas empiéter de plus de 3 ½ pouces sur la largeur exigée pour l’escalier.

Handrails and stair stringers shall not project more than 3 ½ in. into the required width of stairway.

 

Donc, dans la partie 9, l’empiétement avait déjà une portée plus large en incluant ce qu’il y avait sous la main courante, soit minimalement le limon. Toutefois, lorsque le CNB utilise uniquement du vocabulaire spécifique et non pas des mots plus englobants, cela peut causer certains problèmes : nous le verrons dans les modifications qui ont suivi. On peut déjà constater dans l’extrait ci-dessus que, dans la version originale en anglais, le pluriel est utilisé (handrails and stringers), alors que dans la version en français ces mêmes termes sont employés au singulier (main courante ou un limon).

Dans le CNB 80 mod. Qc, sans que cela ne soit vu comme une modification, la dimension de 3 ½ pouces du CNB 1977[2] est devenue 100 mm et non pas 89 mm ou 90 mm comme dans les codes écrits par le Québec [9.8.7.7. du CNB 1980 mod. Qc]. Dans le CNB 1985, sans que le paragraphe 3.4.3.4. 4) ne comporte de modifications, le libellé change et s’aligne avec la partie 9 en indiquant que :

Les mains courantes et les limons d’escalier ne doivent, en aucun cas, déborder de plus de 100 mm dans la largeur exigée pour une issue. [3.4.3.4. 4) CNB 1985 mod. Qc]

No handrail or stair stringer shall project more than 100 mm into the required width of an exit.

 

On pourrait aussi se demander s’il y a des éléments qui sont omis ou introduits dans le processus de traduction des exigences de l’anglais au français. On trouve, notamment, en français, un manque d’uniformité dans certains choix rédactionnels : le pluriel est maintenant utilisé dans la partie 3 pour parler des mains courantes alors que le texte de l’article dans la partie 9 utilise le singulier. De plus, on observe que dans la version originale en anglais le singulier est maintenant utilisé (handrail or stair stringer), alors que le français a choisi d’adopter le pluriel dans cette version (mains courantes et limons).

De plus, dans la partie 9 des versions 1980 et 1985 du CNB, on trouve les déterminants indéfinis « une et un » (voir citation ci-dessous), alors que dans la partie 3, il s’agit du déterminant défini « les » (voir citation ci-dessus). Mais en opposé à la partie 3, la partie 9 en anglais utilise le pluriel (handrails and stair stringers), alors que le français utilise le singulier (main courante et limon).

Une main courante et un limon ne doivent pas empiéter de plus de 100 mm sur la largeur exigée pour l’escalier. [3]

Handrails and stair stringers shall not project more than 100 mm into the required width of stairway.

 

Le déterminant indéfini « un ou une » dans ce type de contexte peut être confondu avec le pronom numéral « 1 » qui précise un nombre d’éléments, c’est pourquoi l’utilisation du déterminant défini pluriel « les » est plus appropriée dans le cas du Code. De plus, dans la partie 3, le terme « issue » ou « exit » a un sens plus large que dans la partie 9 où il vise uniquement « l’escalier » ou « stairway ».

Dans le CNB 1990 mod. Qc et dans les autres éditions jusqu’au CNB 2010 mod. Qc, dans la partie 3, cette exigence, qui est désormais dans un autre paragraphe, comporte une ligne dans la marge qui signifie clairement qu’il y a des modifications rédactionnelles dans l’exigence. L’exigence est ainsi présentée :

Les mains courantes et les constructions en dessous peuvent empiéter d’au plus 100 mm de chaque côté sur la largeur exigée pour un moyen d’évacuation. [4]

Handrails and construction below handrails are permitted to project into the required width of means of egress but the projections shall be not more than 100 mm on each side of the required width.

 

Le but ici est d’aller plus loin dans la permission qui ne visait que les limons en ajoutant les « constructions en dessous », soit, à notre avis, les garde-corps et les limons et en allant plus loin que le terme « issues » dans la version précédente du CNB en utilisant le terme « moyen d’évacuation » pour inclure les accès à l’issue et les issues. Vous remarquerez, cependant, que les mots « de chaque côté » sont apparus! Alors, selon la largeur requise des moyens d’évacuation, et s’il s’agissait de larges escaliers qui nécessiteraient la présence de mains courantes intermédiaires, comment devrions-nous considérer la présence de ces mains courantes intermédiaires? Est-ce qu’il faudrait élargir le moyen d’évacuation en conséquence selon la dimension de la main courante intermédiaire et de la construction qui la supporterait? Rien dans le CNB 1990 ne répondait à ces questions. Sans doute, il y a eu des utilisateurs du CNB qui ont soumis des demandes de modification, car il y avait clairement des problèmes d’interprétation entre les concepteurs et les autorités compétentes.

Il y a d’autres modifications dans le CNB 1995, mais cette fois dans la partie 9! Ainsi, il y a eu le remplacement des mots « les constructions » par « les éléments », tout en précisant que « les supports de main courante et les limons » faisaient partie des « éléments ».

Les mains courantes et les éléments sous les mains courantes, y compris les supports de main courante et les limons, ne doivent pas empiéter de plus de 100 mm sur la largeur exigée pour l’escalier. [9.8.7.6. CNB 1995 mod. Qc]

Handrails and constructions below handrails, including handrail supports and stair stringers, shall not project more than 100 mm into the required width of a stairway.

 

Surprise! Bien que l’on précise quels sont les éléments qui peuvent empiéter, on voit disparaitre la précision voulant que ça s’applique « de chaque côté ». Ainsi, cette nuance disparait dans la partie 9, alors que les mots « de chaque côté » sont toujours présents dans la partie 3 du CNB 1995. En outre, dans le CNB 1995 mod. Qc, il n’y a pas encore, dans la partie 9, l’obligation d’avoir des mains courantes intermédiaires, ce qui apparaît uniquement dans le CNB 2010 mod. Qc.

Comment les autorités compétentes et les concepteurs devaient-ils comprendre le retrait de ces termes? Par exemple, dans les premières fiches explicatives produites par la Garantie de la construction résidentielle (GCR) pour informer les entrepreneurs des éléments qui étaient le plus souvent soulignés en non-conformités, la fiche technique FT-9.8.7.-01, qui a été publiée en 2017 et révisée en 2021, sur les changements aux exigences du Code 2010 concernant les mains courantes illustrait très bien comment certaines autorités compétentes considéraient le retrait des mots « de chaque côté » dans le CNB 1995 et le fait qu’ils n’aient pas été modifiés dans le CNB 2010. Ainsi, la figure 9.8.7. -01.12 indiquait que la deuxième main courante impliquait un empiétement supplémentaire à la valeur permise, ce qui forçait l’ajustement de la largeur exigée en conséquence. Sans doute, plusieurs entrepreneurs ont élargi leurs escaliers pour respecter cette interprétation. À noter que seule la dernière version de la fiche a été approuvée par la Régie du bâtiment du Québec.

Dans le CNB 2005 mod. Qc et dans le CNB 2010 mod. Qc, les exigences des empiétements des mains courantes, en plus de s’appliquer à la largeur exigée pour un escalier, ont été élargies pour s’appliquer également aux rampes. Il y a aussi eu un ajout de renvois vers d’autres articles, soit vers l’article 9.8.2.1. qui porte sur les largeurs exigées pour les escaliers d’issue et pour les escaliers utilisés par le public, ainsi sur les allègements pour les escaliers desservant les logements, et vers l’article 9.8.5.2. concernant les largeurs des rampes d’issue, des rampes communes et les allègements encore une fois pour certaines rampes dans les logements.

Les mains courantes et les éléments de construction sous les mains courantes, y compris les supports de main courante et les limons, ne doivent pas empiéter de plus de 100 mm sur la largeur exigée pour l’escalier ou la rampe (voir les articles 9.8.2.1. et 9.8.5.2.). [9.8.7.6. du CNB 2010 mod. Qc]

Handrails and constructions below handrails, including handrail supports and stair stringers, shall not project more than 100 mm into the required width of a stair or ramp. (See also Articles 9.8.2.1. and 9.8.5.2.)

 

Dans les faits, la modification de cette exigence dans le CNB 1995, mais aussi dans le CNB 2005 mod. Qc, était une modification qui avait dans l’optique de permettre la présence de mains courantes intermédiaires. Cependant, cette exigence visant les mains courantes intermédiaires n’est apparue dans la partie 9 que dans le CNB 2010 mod. Qc. Étant donné que, depuis deux cycles de publication, une interprétation circulait dans le milieu de la construction qui prenait en compte les mots « de chaque côté », il était difficile de la remettre en question.

Ainsi, lorsque les exigences ont été modifiées également dans la partie 3 dans le CNB 2015 mod. Qc et que les répercussions sur le fait de faire des cages d’escalier au-delà des minimums de 1 100 mm ou 1 650 mm sont apparues, alors que les études d’impact visant les mains courantes intermédiaires ne mentionnaient nullement des coûts attribués à cet élargissement, plusieurs concepteurs et promoteurs se sont interrogés. En effet, cela a nécessité différentes demandes d’interprétation et des échanges entre la RBQ, Technorm et la GCR pour permettre d’illustrer adéquatement les exigences des escaliers communs selon le CNB 2015 mod. Qc.

Selon les communications entre les autorités compétentes et les comités de rédaction du CNB, le retrait des mots « de chaque côté » avait pour but de mieux couvrir l’empiétement de toutes les mains courantes, autant de celles murales que de celles au-dessus des garde-corps et celui des mains courantes intermédiaires, mais comme l’article des mains courantes intermédiaires a pris plus de temps à arriver dans le texte du CNB, il était alors difficile de comprendre ce changement.

Ainsi, ce n’est que dans le CNB 2015 mod. Qc que l’exigence de la partie 3 a été modifiée pour enlever, comme dans la partie 9, les mots « de chaque côté ». La seule différence entre les deux exigences est que la partie 3 utilise le terme plus inclusif « moyen d’évacuation » plutôt que « issue ».

Les mains courantes et les éléments de construction sous les mains courantes, y compris les supports de main courante et les limons, ne doivent pas empiéter de plus de 100 mm sur la largeur exigée pour un moyen d’évacuation. [3.4.3.3. 4) du CNB 2015 mod. Qc]

Handrails and construction below handrails, including handrail supports and stair stringers, shall not project more than 100 mm into the required width of a means of egress.

 

À noter qu’il n’y a aucune modification prévue concernant cet article dans le CNB 2020 mod. Qc! Vous pouvez consulter la fiche émise avec le CNB 2015 mod. Qc : Mains courantes des escaliers communs (FT-9.8.7. -02), mais assurez-vous d’avoir la révision qui a la date du 2023-05-31.

Harmonisation des exigences

Comme nous avons pu le voir avec ces deux exemples, avec le temps, le CNB a cherché à harmoniser les exigences entre les parties 3 et 9, tout en maintenant, si nécessaire, une différenciation selon l’usage, la taille et les risques liés aux bâtiments. On peut voir également que les versions en anglais et en français utilisent maintenant dans les deux situations le pluriel et des déterminants définis. Cependant, cette évolution se traduit malheureusement parfois par des ajustements successifs qui tiennent compte des particularités de chaque type de bâtiment, tout en alignant les pratiques de construction sur les meilleures normes de sécurité et d’accessibilité.

Si vous souhaitez approfondir ou confirmer vos connaissances sur le sujet, vous pouvez visionner l’extrait ci-dessous, qui aborde les éléments mentionnés dans l’article.

Conclusion

L’évolution des exigences du CNB pour les mains courantes reflète l’adaptation constante aux besoins de sécurité, d’accessibilité et de confort. Suivre les mises à jour du CNB et comprendre les interprétations des autorités compétentes, comme la RBQ, est essentiel pour tout professionnel de la construction. Technorm continue de fournir des formations et des clarifications pour accompagner les concepteurs dans cette démarche, garantissant que les bâtiments répondent aux exigences les plus récentes du code, bien que cela implique parfois quelques mois pour permettre de conclure sur ces interprétations. Avec le présent article, nous espérons avoir pu répondre à des questionnements soulevés dans des formations ayant eu lieu l’année dernière.

Par : 

Nicole Olivier, architecte, Cheffe de service de la formation continue

 [1] Les exigences changent parfois de numérotation d’une version à l’autre; si vous les cherchez, voici les références spécifiques de cette exigence dans les différentes versions :
[2] Dernière version du CNB qui utilise des mesures impériales.

[3] Encore une fois, la localisation de l’exigence n’est pas identique selon les versions :

  • 9.8.7.10. dans le CNB 1985 mod. Qc
  • 9.8.7.8. dans le CNB 1990 mod. Qc
  • 9.8.7.6. 1) dans le CNB 1995 mod. Qc, CNB 2005 mod. Qc, CNB 2010 mod. Qc et CNB 2015 mod. Qc.
[4] Encore une fois, la localisation de l’exigence n’est pas identique selon les versions :
  • 3.4.3.6. 4) dans le CNB 1990 mod. Qc
  • 3.4.3.5. 4) dans le CNB 1995 mod. Qc
  • 3.4.3.3. 4) dans le CNB 2005 mod. Qc et CNB 2010 mod. Qc.

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